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leurs villages, jusqu’au moment où ils en faisaient une cargaison pour l’Oubangi[1].

Ajoutons que si ce commerce de chair humaine était localisé dans quelques régions, la traite des esclaves, que les riverains du fleuve allaient ramasser chez les Mongos de l’intérieur, pour les envoyer à la côte, était un phénomène général dans tout le bassin du Congo[2].

On ne doit pas perdre de vue de telles horreurs, quand on se demande s’il n’eut pas mieux valu que les habitants de L’Afrique équatoriale restent livrés à eux-mêmes et n’apprennent pas à connaitre les « bienfaits de la civilisation ».

Au surplus, même si Léopold II n’avait pas jeté son dévolu sur le Congo, même si l’État Indépendant n’avait pas été constitué, les Congolais n’en eussent pas moins été « civilisés », de gré ou de force, soit par les Arabes, qui envahissaient peu à peu les régions du haut fleuve, soit par les Européens, de nationalités diverses, qui avaient des établissements commerciaux dans le Bas Congo.

Or, s’il faut en croire ceux qui ont vu à l’œuvre les uns et les autres, cette colonisation par des trafiquants, quelle que fut leur race, s’accompagnait de tels excès, ou présentait de tels inconvénients, que tout le monde, à cette époque, souhaitait l’établissement au Congo d’un gouvernement régulier.

Pour ce qui concerne, d’abord, le Bas Congo, on sait que, pendant plus de trois siècles, cette région de la côte avait été ravagée, décimée, saignée à blanc par la traite. À la fin du XVIIIe siècle, on évaluait à cent mille et plus, par an, le nombre des nègres qui étaient transportés, chaque année, en Amérique ou dans les Indes occidentales[3], et ce n’est guère que dans

  1. Ibid. p. 211. — On trouvera aussi de nombreux renseignements sur le cannibalisme, dans Hinde : La chute de la domination des Arabes an Congo, pp 42 et suiv. (trad. fr.). Bruxelles, 1897. Il convient toutefois de constater que la plupart de ces faits se sont produits en temps de guerre.
  2. Voir Lemaire. Les Wamboundous, Revue de géographie. Juin, juillet, août 1902.
  3. Voir Fox Bourne. Blacks and Whites in West africa, pp. 15 et suiv.