Page:Vandervelde - La Belgique et le Congo, le passé, le présent, l’avenir.djvu/196

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a) Au Sénégal, on « couillonne à la bascule » ; on se sert, pour mesurer un mètre d’étoffe, du yard, qui ne vaut que 91 centimètres. On trompe même les Européens, en leur vendant, pour un kilogramme, un paquet de sucre fabriqué exprès par une maison de Bordeaux, qui ne pèse pas 900 grammes.

b) En Casamance, on a coutume de dire « bonne année de riz, mauvaise année de palmistes ». Cela signifie que l’indigène, au moment des récoltes, cède au traitant une partie de son riz ou de son mil. Sa provision épuisée — ce qui ne tarde pas si la récolte n’a été qu’ordinaire — il retourne à la boutique et on lui vend une mesure de riz, pour une mesure d’amandes de palmes. En 1903, la famine étant pressante, les affaires ne furent que meilleures, et les Diolas durent fournir deux boisseaux d’amandes pour un boisseau de riz.

c) Dans l’intérieur, certains traitants, au moment des récoltes, achètent tout ce qu’ils peuvent de mil ou de riz. Soit pour payer l’impôt, soit pour se procurer d’insignifiantes bagatelles, les noirs se démunissent alors avec entrain. Ces provisions sont soigneusement emmagasinées et on attend que la faim fasse revenir l’imprévoyant indigène. On lui revend alors ses grains, au double ou au triple, contre tout ce qu’il peut posséder. S’il n’a rien, c’est la famine.

d) En Guinée française, et dans d’autres colonies, on pratique le « coxage ». On envoie des dioulas, des interprètes, parfois avec des chevaux, au-devant des caravanes. Avant toutes affaires, on comble de cadeaux de pacotille les vendeurs, on les héberge, on les grise, et, par là, on s’assure l’achat du caoutchouc, de l’arachide ou de la gomme.

Mais on arrive ainsi à payer plus cher qu’on ne peut vendre dans la Métropole. Et, pour se rattraper, on fraude sur les poids, les paiements, cependant que le vendeur falsifie les produits. C’est l’une des causes, non la moindre, de la crise de caoutchouc dont la Guinée a souffert en 1900-1901, et dont elle ne s’est relevée que lentement. Dernièrement on signa-