Page:Variétés Tome II.djvu/296

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de guerre, pour le contraindre à promettre de payer une bonne rançon, ou indiquer où il tient serré son argent. Manans, si vous eussiez mal traicté ces goujats, comme ont fait ès guerres passées les Piemontois et Savoyards, ils ne vous feroient pas tant de mal. Nous voudrions desirer la guerre encores une fois, et retourner endurer les maux que nous avons soufferts ! Je ne le pense pas, quoy que les François soient de ce naturel qu’ils ne se souviennent plus du mal qu’ils ont enduré quand ils se trouvent un peu à leur aise, font bonne chère et gros feu. Tels François, en un mot, ne sçavent ce qu’ils demandent : ils sont changeans comme le temps, et font voile à tout vent. On a si long-temps desiré en cour le Ver23, et à present plusieurs le voudroient mettre à la pille au verjus. Il me souvient d’avoir ouy un Tourangeois, habitant de la ville de Marseille, qui disoit trois jours auparavant qu’on tuast ce tyran de Casau24, qu’il voudrait avoir donné un tiers de son capital et que


son premier état qu’à l’aide d’une clef faite expressément pour ce sujet. » Quand on vouloit faire quelque vol sans être inquiété par les cris de celui qu’on voloit, on lui mettoit dans la bouche cette poire d’angoisse, « qui, en même temps, s’ouvroit et se delaschoit, fesant devenir le pauvre homme comme une statue beante, et ouvrant la bouche sans pouvoir crier ni parler que par les yeux. »

23. Le président qui, en 1597, s’étoit rendu très populaire à Marseille par l’oraison funèbre qu’il avoit faite de Libertat.

24. Charles de Casaux, consul, et Louis d’Aix, viguier, tenoient et tyrannisoient Marseille pour le duc d’Épernon. V. Bouche, Hist. de Provence, 2, 812.