Page:Variétés Tome IV.djvu/9

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Une femme bien laide et coucher auprès d’elle ;
En avoir une belle et en estre jaloux,
Craindre tout, l’espier, se gêner de courroux,

Y a-t-il quelque peine en enfer plus cruelle ?

L’on dit ordinairement que là où la vache est liée, il faut qu’elle broute10 ; ainsi où le pauvre idiot est attrapé, il faut qu’il demeure en ces liens ; il tient beaucoup mieux que par le pié ; le geolier en ces affaires-là s’emprisonne soy-mesme, et, en cette restrainction, il ne peut trouver de caution quy l’en delibère ; tel octroy est à la mort et à la vie. Quant à ceux quy ont de belles femmes, sont heureux et ne peuvent pas par elles estre incommodez ; quand une belle femme est bien entretenue, elle est de plus grand rapport qu’un moulin à vent ; comme au contraire, quand elles sont laides, elles baillent de l’argent pour faire ce qu’on faict de là les pontz, quy, outre l’injure, fait souvent faire banqueroute au pauvre malotru confraire de Saint-Prix11.

Le commun dire est bien veritable, que la femme fait ou ruine le mesnage, et comme dict le sage en ses problesmes par ces termes : La meilleure et plus excellente richesse qu’un homme puisse avoir, c’est de s’allier avec une femme sage et vertueuse, parce qu’après il se pourra vanter d’avoir en possession un heritage merveilleusement fertile.



10. Molière donne une variante de ce proverbe quand il dit, dans le Médecin malgré lui (acte 3, scène 3) : « La où la chèvre est liée, il faut bien qu’elle y broute. »

11. V. l’avant-dernière note de la page 8.