Page:Variétés Tome V.djvu/254

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Vers la fin du repas, il faut se rendre alerte
Pour mettre adroitement la main sur la desserte ;
Vous pouvez sans risquer ôter de chaque plat
Le morceau le meilleur et le plus delicat.
Bien plus, si vous voulez qu’une telle reserve
Par un revenant bon vous profite et vous serve,
Il faut vous accorder avec d’honnêtes gens
Qui pour un certain prix prennent vos restaurans.
Habile à menager les profits de la graisse12,
Voulez-vous que chacun à l’acheter s’empresse ?
Ayez soin d’y jetter du sel abondamment.
Autre avis qui vous doit servir utilement :
Il faut de tems en tems prendre à la boucherie
Quelque pièce qui soit de graisse bien fournie,
Par exemple une longe, ou de ces aloyaux
Qui sont sans contredit de succulens morceaux ;
Prenez-en tous les jours : telle pièce, bien cuite,
Et de graisse et de jus remplit la lechefrite.
J’en sçai beaucoup qui font sur la graisse un grand gain.
Quand pour une etuvée il vous faudra du vin,
Faites que le poisson en ait sa juste dose
Et que dans la bouteille il reste quelque chose.
Si vous trouvez un jour quelque bonne maison,
Loin d’epargner le bois, brûlez-en à foison :



12. C’étoit depuis long-temps le profit le plus naturel des filles de cuisine :

Je gaigne douze ecus par an
Sans mon pot à la graisse ;
Je mangeons tous les soirs du rost,
Farira lon la, fariran lan lost.

(Le doux entretien des bonnes compagnies, 1634, in-12, chanson 57e.)