Page:Variétés Tome VII.djvu/149

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cipalles, qui nous ont amené l’extrême cherté que nous endurons, lesquelles nous deduirons particulièrement l’une après l’autre.

La première cause doncques de la cherté est l’abondance de l’or et de l’argent, qui est en ce royaume plus grande qu’elle ne fut jamais. De quoy plusieurs s’esbahiront, veu l’extrême pauvreté qui est au peuple. Mais en cela il faut dire le vieil proverbe : c’est qu’il y a plus d’or et d’argent qu’il n’y eut jamais, mais qu’il est mal party. Et, pour prouver mon dire par vives raisons, il faut considerer qu’il n’y a que six vingts ans que la France a la grandeur et la longue etendue qu’elle a maintenant. Et, si on veut regarder plus haut, comme du temps du roy saint Loys, et dessoubs après, les rois de France ne tenoient aucune mer en leur puissance et n’avoient nulle province ny ville sur la mer, ains ne tenoient que le nombril23 de la Gaule, qui encore estoit guerroyé, debattu et oppressé par les Anglois et par plusieurs petits seigneurs particuliers qui estoient comme rois en leur poignée de terre. Les duchez de Guyenne et de Normandie, et le comté de Poictou, et la coste de Picardie, estoient possedées par l’Anglois ; la Provence avoit son comte, la Bre-


du seigneur de Malestroict, conseiller du roy et maistre ordinaire de ses comptes, sur le faict des monnoyes, presentez à Sa Majesté au moys de mars MD.LXXVI. Paris, 1578, in-8, sans pagination.)

23. Aujourd’hui l’on diroit le cœur. Léon Trippault, dans ses Antiquités d’Orléans, se sert de la même expression pour la ville dont il parle, quand il dit qu’elle est le nombril de Loyre.