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dition d’être voulue par le peuple (§ 4) de la nation qui la fait, d’être fondée sur une cause juste et sur des motifs honnêtes :


« Les peuples toujours prêts à prendre les armes, dès qu’ils espèrent y trouver quelque avantage, sont des injustes, des ravisseurs ; mais ceux qui semblent se nourrir des fureurs de la Guerre, qui la portent de tous côtés sans raisons ni prétextes, et même sans autre motif que leur férocité, sont des Monstres, indignes du nom d’hommes. Ils doivent être regardés comme les Ennemis du Genre-humain, de même que, dans la Société civile, les Assassins et les Incendiaires de profession ne sont pas seulement coupables envers les victimes particulières de leur brigandage, mais encore envers l’État, dont ils sont déclarés ennemis. Toutes les Nations sont en droit de se réunir pour châtier, et même pour exterminer ces peuples féroces »  (§ 34).


Deux choses sont nécessaires à la justice de la guerre : « 1°. Un droit à faire valoir ; c’est-à-dire, que l’on soit fondé à exiger quelque chose d’une Nation. 2°. Que l’on ne puisse l’obtenir autrement que par les armes" (§ 37). « C’est une erreur non moins absurde que funeste, de dire que la Guerre doit décider les Controverses entre ceux qui, comme les Nations, ne reconnaissent point de Juge. La Victoire suit d’ordinaire la force et la prudence, plutôt que le bon droit » (§ 38).

Pénétré de cette idée que la guerre est un mal, dont le souverain doit préserver son peuple, un droit terrible dont on ne peut user, même envers une nation coupable, qu’à la dernière extrémité, Vattel se montre très sévère sur les conditions dans lesquelles une nation peut recourir aux armes. La guerre n’est permise que pour venger (§ 34) une injure reçue, ou pour se garantir de celle dont on est menacé (§ 26) : « C’est une Loi sacrée du Droit des Gens, que l’accroissement de puissance ne peut seul et par lui-même donner à qui que ce soit le droit de prendre les armes, pour s’y opposer » (§ 43). Les confédérations paraissent à Vattel le meilleur moyen de conserver l’équilibre d’un peuple et de maintenir ainsi les libertés d’une nation (§ 49). Si un Prince fait une guerre injuste, chacun est en droit de secourir l’opprimé. La guerre doit être précédée d’une déclaration, dernier moyen de terminer le différend sans effusion de sang, en exposant le sujet pour lequel on prend les armes. Dès l’instant que la guerre est déclarée dans les formes, en toute bonne foi sur la justice de leur cause, par des souverains entre lesquels, vu l’indépendance des nations (§ 70), nul ne peut décider, elle devient légitime. La distinction de la justice et de l’injustice de la guerre cesse de produire effet entre les belligérants pour n’en plus trouver qu’entre les belligérants et les neutres.

L’effet de la guerre est très général. Comme le souverain représente la nation, quand un souverain a déclaré la guerre à un autre, les deux nations sont ennemies, et tous les sujets de l’une sont ennemis de l’autre (§ 70).