Page:Vattel - Le Droit des gens, ou principes de la loi naturelle, 1758, tome 1.djvu/86

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PREFACE.

Hobbes, dans l’Ouvrage de qui on reconnoît une main habile, malgré ſes paradoxes & ſes maximes déteſtables ; v, dis-je, eſt, à ce que je crois, le premier qui ait donné une idée diſtincte, mais encore imparfaite du Droit des Gens. Il diviſe la Loi Naturelle en Loi Naturelle de l’Homme, & Loi Naturelle des États. Cette dernière, ſelon lui, eſt ce que l’on appelle d’ordinaire Droit des Gens. Les Maximes, ajoûte-t-il, de l’une & de l’autre de ces Loix ſont préciſément les mêmes ; mais comme les États acquièrent en quelque manière des propriétés perſonnelles ; la même Loi qui ſe nomme Naturelle, lorsqu’on parle des Devoirs des Particuliers, s’appelle Droit des Gens, lorsqu’on l’applique au Corps entier d’un État, ou d’une Nation[1]. Cet Auteur a fort bien obſervé que le Droit des Gens eſt le Droit Naturel appliqué aux États, ou aux Nations. Mais nous verrons dans le cours de cet Ouvrage, qu’il s’eſt trompé quand il a cru que le Droit Naturel ne ſouffroit aucun changement néceſſaire dans cette application ; d’où il a conclu que les Maximes du Droit Naturel & celles du Droit des Gens ſont préciſément les mêmes.

Pufendorf déclare qu’il ſouſcrit abſolument à cette opinion de Hobbes[2]. Auſſi n’a-t-il point traité à-part du Droit des Gens, le mêlant par-tout avec le Droit Naturel proprement dit.

Bar-
  1. Rurſus (Lex) naturalis dividi poteſt in naturalem hominum, qua ſola obtinuit dici Lex naturæ, & naturalem Civitatum, quæ dici poteſt Lex Gentium, vulgo autem Jus Gentium appellatur. Præcepta utriusque eadem ſunt : Sed quia Civitates ſemel inſtituta induunt proprietates hominum perſonales, Lex quam loquentes de hominum ſingulorum officio naturalem dicimus, applicata totis civitatibus, nationibus ſive gentibus, vocatur Jus Gentium. De Cive, cap. XIV. §. 4. Je me ſers de la traduction de Barbeyrac, Pufendorf Droit de la Nature & des Gens, Liv. II. Chap. III. §. XXIII.
  2. Ibid.