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L’EXIL


« Le bon Père, tenant toujours la sainte hostie entre ses doigts, m’adresse quelques paroles pleines de cœur et d’à-propos, me disant que j’étais heureux de faire mes vœux à un âge encore si jeune, en un temps de persécution, exilé sur la terre d’Espagne, patrie de saint François Xavier et de sainte Thérèse... L’émotion me gagne. Je me mets à pleurer. Je reçois mon Jésus, et je retourne à ma place, le cœur surabondant de bonheur et de consolation. J’étais en Paradis[1] ... »

XII

Au matin du 1er septembre 1881, à Barcelone, dans une petite chapelle de la rue Ancha, le R. P. Durin, Missionnaire du Sacré-Cœur disait la messe. Autour de l’autel étaient groupés le P. Navarre, le P. Cramaille, premier prêtre de la Petite-Œuvre, et deux Frères coadjuteurs. Ils vont partir au nom de leurs deux mères, la sainte Église et la petite Société, pour les îles sauvages de la Mélanésie et de la Micronésie. Le R. P. Jouet, en ce temps-là procureur général des Missionnaires du Sacré-Cœur, est accouru de Rome, tout exprès. Le frère Verjus, caché derrière l’autel, « en tête à tête avec son Jésus caché, comme lui, et heureux de l’être », tient l’harmonium. Au commencement de la messe, il entonne l’Ave Maris Stella. « Avec quel cœur, écrit-il, et quelle ardeur je chantai ces sublimes paroles qui résument toutes mes aspirations et tous mes désirs ! J’étais bien ému. Tout se déroulait en ce moment sous mes yeux. Je voyais presque clairement les plans du bon Dieu, le divin Maître se servant de tout, même des obstacles... J’admirais. J’étais heureux. » À l’Évangile, le R. P. Durin, supérieur de la Mission, se tourna vers l’assistance et, d’une voix que l’émotion rendait tremblante, il demanda des prières pour le succès de cet apostolat lointain.

« De tout mon cœur, dit le pieux Frère, je priais le bon

  1. 19 mars.