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— 1814 —

sur la sévère observation des dimanches et des jours fériés ; les classes lettrées, que soulevait la loi sur la censure. Le préambule du projet de loi sur les biens nationaux non vendus généralisa la colère. Cette masse nombreuse de gouvernés, que l’on voit soutenir tous les pouvoirs par amour de l’ordre et du repos ; que toute opposition effraye et indigne, et qui résume tous les intérêts d’une nation dans les intérêts matériels ; ces gouvernés, disons-nous, si dociles toujours à tous les gouvernements, quels qu’ils soient, se tournèrent immédiatement contre la Restauration. La peur alors gagna les capitalistes engagés dans les fonds publics ; le 5 pour 100, qui, le 13 septembre, était au delà de 78 francs, tomba d’un franc le lendemain ; quinze jours après, il était descendu au-dessous de 72 francs.

Cet ébranlement matériel et moral ne pouvait échapper aux amis intelligents de la royauté ; ils voulurent calmer l’opinion et rassurer les intérêts à l’aide d’articles publiés dans les principaux organes de la presse royaliste. Ces journaux se mirent à l’œuvre : les uns s’efforcèrent de prouver aux gouvernés de toutes les classes que la France, à aucune époque de son histoire, n’avait réuni d’aussi complètes garanties de paix et de bonheur ; d’autres adjuraient les royalistes de renoncer à faire revivre l’ancien régime, et de reconnaître les faits accomplis.

M. de Chateaubriand, par sa brochure de Buonaparte et des Bourbons, publiée le 1er avril, avait puissamment aidé au rappel de ces princes ; il crut leur rendre un nouveau service en écrivant des Réflexions politiques sur les intérêts de tous les Français, réflexions destinées à arrêter le pouvoir sur la pente fatale où l’entraînaient l’aveuglement et la sottise des poursuivants d’ancien régime, et dans lesquelles il disait à ceux-ci : « La Charte n’est point une plante exotique, un accident fortuit du moment ; c’est le résultat de nos mœurs présentes, c’est un traité de paix signé entre les deux partis qui ont divisé la France, traité où chacun des deux abandonne quelque chose