Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
— 1814 —

gime, même dans ses détails les plus surannés. Quelques semaines auparavant, la population de Paris, étonnée, avait vu la famille royale, escortée par de nombreux détachements de troupes, entourée par tous les grands corps de l’État, suivre à pied, et des cierges à la main, une statue de la Vierge que le clergé promenait processionnellement dans les rues, en commémoration du vœu de Louis XIII, qui avait placé la France sous la protection spéciale de la mère de Jésus-Christ. Une lettre du roi aux évêques, et dans laquelle Louis XVIII attribuait surtout à ce saint patronage les faveurs dont Dieu l’avait récemment comblé, avait annoncé cette cérémonie. Lors même que la raison publique aurait pardonné à des convictions toujours respectables cet inutile retour vers des usages vieux de deux siècles, cependant il fallait bien prendre au sérieux les actes du gouvernement et le langage des hommes le plus haut placés dans la faveur du souverain et dans l’administration.

Les orphelines de la Légion d’honneur, par exemple, se voyaient disputer les biens, prix du sang de leurs pères. Le projet de loi présenté par M. Ferrand leur enlevait les propriétés nationales composant la presque totalité de leur dotation. On était même allé plus loin : une ordonnance avait remis en question leurs droits à la reconnaissance nationale ; mais la clameur avait été si forte, que les ministres s’étaient vus forcés de la rapporter. Cinq maisons d’éducation existaient sous l’Empire pour ces orphelines ; quatre (Paris, Écouen, Barbeaux et les Loges) furent supprimées ; le gouvernement ne conserva que la maison de Saint-Denis[1]. Les invalides ne furent pas mieux traités : 1,100 se virent chassés de France, sous prétexte que le pays de leur naissance était redevenu étranger ; 1,500 autres, nés sur le sol, furent renvoyés dans leurs foyers avec des pensions honteusement modiques ; on parlait, en outre, tout haut de la suppression des maisons succursales. Les bourses des écoles militaires, destinées aux fils des

  1. Ordonnance du 19 juillet.