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— 1815 —

le nouveau pouvoir accueillait toutes ces fantaisies de vanité, peut-être uniquement comme un moyen de répandre des grâces qui ne lui coûtaient rien, ils concluaient qu’on ne multipliait ainsi cette distinction que pour l’amoindrir dans leurs personnes.

Ce n’était pas l’entourage le mieux choisi pour un trône qui tâchait de se relever d’un long abaissement, que cette noblesse divisée en trois classes aussi distinctes que son origine. La première classe s’était trop bien trouvée des temps antérieurs à la Révolution pour ne pas conserver ses tendances à y revenir ; ce n’eût été pour elle qu’obéir à l’instinct de sa nature ; elle en était soupçonnée, du moins, et c’en était assez pour exciter la méfiance ; la troisième, qui était le fruit d’un abus exagéré de l’omnipotence royale, devait naturellement appeler à son secours le retour des anciens abus ; et son langage était d’autant plus hautain et absolu, qu’elle croyait ainsi singer mieux le vieux gentilhomme. Peu de sympathie existait entre ces deux classes ; il y en avait encore moins dans la seconde, la noblesse impériale, pour l’une et pour l’autre. Ces hommes nouveaux, qui étaient sortis des rangs et s’étaient placés à la tête du pays, depuis 1797 jusqu’en 1814, avaient senti de bonne heure que leur accord ferait leur force. Dans les habitudes de la vie privée, auxquelles une première aurore de paix semblait les rappeler, ils sentaient le besoin d’une alliance qui leur fût propre ; et ils se trouvèrent spontanément disposés, puisqu’il leur fallait un refuge, à le réclamer dans cette immense majorité bourgeoise et industrielle qui se tenait alors en dehors du débat des vanités, et qui plaçait la sûreté de ses droits réels dans les garanties de la Charte donnée par le roi. C’était aussi dans cet acte que la noblesse de l’Empire se flattait de trouver un appui contre la déchéance et les humiliations, dont elle s’exagérait la menace ; en se rapprochant de ses anciens pairs, elle se donnait le mérite de n’avoir pas oublié son berceau ; et son orgueil n’avait rien à y perdre : les élus de Napoléon avaient donc été dirigés par