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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/179

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— 1815 —

les rendre pour nous une barrière et une force contre les Monarchies du nord de l’Europe. Napoléon avait poursuivi le même but lorsqu’il avait créé la confédération du Rhin, et qu’il s’en était déclaré le protecteur. On se rappelle qu’une des conditions qui fut surtout l’objet de l’insistance des trois grandes puissances du Nord au congrès de Prague, et à laquelle l’Empereur résista le plus longtemps, était précisément sa renonciation à cette protection effective.

Par une coïncidence qu’il n’est pas sans intérêt de signaler, M. de Talleyrand était ministre des affaires étrangères de l’Empire lors de la création de cette confédération du Rhin que le congrès de Vienne s’occupait alors de reconstruire sous un nouveau titre et sur des bases nouvelles. On assure que cette création avait été, pour lui, l’occasion de bénéfices énormes qu’il s’était attribués en faisant payer aux parties intéressées les plus riches une influence que Napoléon était loin de lui laisser ; aux plus pauvres, des services qu’il promettait et qu’il ne rendait pas. Ses bureaux préparaient le travail sur des notes transmises du cabinet de l’Empereur ou de la secrétairerie d’État, et Napoléon seul décidait. M. de Talleyrand n’intervenait que par ses réceptions, ses dîners, et sa signature.

En 1815, l’intérêt de notre puissance, si affaiblie quand l’influence et la force de tous les autres États s’étaient si démesurément accrues, commandait impérieusement au chef de notre diplomatie de faire revivre la politique séculaire de la France à l’égard des États secondaires de l’Allemagne. Il y a plus : signataire de la monstrueuse convention du 23 avril et du traité du 30 mai, le prince de Bénévent pouvait trouver, dans cette question, un moyen d’amoindrir le mal que lui-même nous avait causé. Il ne s’en inquiéta même pas. Les petits États allemands furent pour lui, comme s’ils n’avaient jamais existé ; dans sa légèreté et dans son insouciance, il les abandonna sans réserve à la dure domination de l’Autriche et de la Prusse. Le Danemark lui-même, notre dernier allié, à qui la coalition venait d’enlever la Norvège, comme un châtiment de sa fidélité à