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versement multiples, souvent opposés, que plusieurs milliers de personnes agitaient. Le gouvernement seul ne savait rien, ne voyait rien[1].

La masse des mécontents pouvait se diviser en deux catégories principales : les opposants à la marche réactionnaire du gouvernement royal ; les adversaires de la Restauration et des Bourbons.

Les premiers appartenaient aux Chambres, à l’administration, à la banque, au négoce, à la magistrature et au barreau. Ennemis de l’Empire et de son gouvernement militaire, ils acceptaient la Restauration, comme gouvernement constitutionnel, comme gage de la paix avec l’Europe, et poursuivaient moins le renversement de la royauté qu’un changement dans sa politique. Timides autant que formalistes, ils entendaient ne faire usage que de la voie légale. La réunion des Chambres était indiquée pour le 1er mai : les opposants voulaient qu’une fois assemblées, elles réclamassent impérieusement une complète sécurité pour tous les intérêts matériels issus de la Révolution, ainsi que l’exécution des promesses politiques contenues dans la Charte ; puis, si la résistance du roi et du parti de l’ancien régime forçait de recourir des mesures extralégales, ils espéraient pouvoir accomplir le mouvement « sous les auspices de l’autorité civile et des hommes bien intentionnés[2]. » Ce mouvement, quel devait-il être ? Il avait pour dernier mot la substitution de la branche cadette de Bourbon à la branche aînée, c’est-à-dire, l’avénement du duc d’Orléans.

Les adversaires des Bourbons, ceux du moins qui s’occupaient activement des moyens de les renverser, se composaient de quelques hauts fonctionnaires de l’Empire délaissés par le nouveau gouvernement, de généraux sans emploi, de

  1. « On conspirait, comme on dit, sur les bornes, au coin des rues ; personne, si ce n’est le ministère, n’ignorait ce qui se passait. » (Mémoires du duc de Rovigo, t. VII.)
  2. Mémoires du général la Fayette, t. V.