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mouvement en invoquant un souvenir unique, celui de l’Empire, en prononçant un seul nom, celui de l’Empereur. On croyait n’avoir rien à craindre de leurs dispositions personnelles pour ce dernier, car l’engagement le plus formel avait été pris par eux de ne pas rappeler Napoléon de son exil[1]. Auraient-ils réussi à maîtriser le sentiment du peuple et de l’armée ? c’est douteux. Il n’y avait place alors, dans un changement, que pour l’Empereur, et le mouvement, comme nous en donnerons la preuve plus loin, eût très-certainement emporté le duc d’Orléans avec les autres princes de sa race. Quoi qu’il en soit, le plan de ces généraux, dans les derniers jours de février, était arrêté dans toutes ses parties, et ils n’attendaient plus, pour agir, que le signal de Fouché, qui avait noué les principaux fils de ce complot particulier.

L’éloignement où la Restauration tenait le duc d’Otrante avait fait de grands loisirs à cet ancien ministre de la police impériale ; il les employait à se mêler à toutes les intrigues et à courir d’un conciliabule à l’autre, prodiguant partout les promesses et les conseils. Fouché avait le pied dans toutes les coteries. Ainsi on le voyait, à la fois, ourdir le complot militaire dont nous venons de parler ; se tenir en rapports intimes avec les poursuivants de révolution légale et les conspirateurs exclusivement impérialistes, prononçant le nom du duc d’Orléans avec les premiers, et affirmant aux seconds qu’il travaillait en faveur de Napoléon ; correspondre avec le duc de Dalberg, un de nos plénipotentiaires à Vienne, et passer la plus grande partie de ses soirées chez la princesse de Vaudemont-Lorraine, dont le salon, espèce de terrain neutre pour toutes les opinions, était le rendez-vous assez habituel de plusieurs ministres de Louis XVIII. Le soir du 5 mars,

  1. Mémoires de M. de la Fayette. Ce général ajoute à cette occasion : « Il fallait que son ambition et son égoïsme (de Napoléon), la dureté et le peu de sincérité de son caractère, eussent laissé des traces bien profondes, pour que la crainte de son retour ait été, chez ses anciens serviteurs, mêlée au désir d’être débarrassés du gouvernement des Bourbons. » (Tome V.)