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— 1815 —

moins une reconnaissance formelle des droits du beau-frère de Napoléon et un traité d’alliance qu’une suspension d’armes, un simple armistice. Murat avait donc abandonné la France et trahi odieusement Napoléon sans des gages bien solides de sécurité ; il ne fut pas longtemps à s’en apercevoir : Louis XVIII refusa de le reconnaître comme roi de Naples, et ses agents furent tolérés plutôt qu’admis dans les autres cours. Le congrès de Vienne s’ouvrit : les pouvoirs des deux ambassadeurs qu’il y envoya furent enregistrés ; mais on enregistra de même ceux des envoyés du roi dont il tenait la place ; les plénipotentiaires des deux compétiteurs, accueillis sous le même titre, furent admis les uns et les autres comme représentant le roi des Deux-Siciles. De ces deux rois, quel était le véritable ? Murat put se convaincre bientôt que ce n’était pas lui.

Le 28 novembre, dans le parlement anglais, un membre de l’opposition de la Chambre des communes, M. Weathbread, reprochant aux ministres de ne pas donner au beau-frère de Napoléon le titre de majesté, de l’appeler simplement Murat, demanda si ces formes insultantes n’étaient pas l’annonce d’une prochaine déchéance. Les ministres refusèrent dédaigneusement de répondre. À quelques jours de là, le 13 décembre, un des organes du cabinet britannique, le Courrier, accusait Murat d’avoir pillé la Prusse, incendié Moscou, égorgé les habitants de Madrid, volé les diamants de la couronne d’Espagne, et lui reprochait d’être le fils d’un « postillon de Cahors en Querci. » Non-seulement ces injures et ces outrages étaient reproduits avec complaisance par la presse censurée de Paris, mais Murat, ayant accordé à la garde nationale de Naples une décoration qui portait pour exergue les deux mots honneur et fidélité, le ministère français s’emparait de ce fait pour dénoncer, dans les journaux dont il disposait, l’usurpation du beau-frère de Napoléon, et pour s’élever contre l’étrange prétention de ce prince à parler de fidélité et d’honneur, quand l’honneur, à Naples, consistait à violer ses serments, et lorsque la