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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/198

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— 1815 —

l’avait trop profondément irrité. Murat n’obtint jamais son pardon[1].

Ce n’était ni de Naples, ni du reste de l’Italie, que s’inquiétait Napoléon. Sa pensée n’avait pas quitté la France ; c’était la France seule qu’il regardait et observait. Lui-même, au reste, l’a dit : dès Fontainebleau, il avait songé au retour[2]. Parti de cette résidence le 20 avril seulement, il avait eu le temps d’apercevoir dans les actes du comte d’Artois, installé depuis huit jours aux Tuileries, dans les mesures adoptées par son gouvernement, et dans le langage de la presse et du parti royaliste, l’avenir de fautes réservé au gouvernement de la Restauration. D’ailleurs, on n’abandonne pas un Empire que l’on a gouverné quinze ans, un pays où on laisse après soi des serviteurs dévoués, des partisans et des admirateurs en nombre considérable, sans y conserver quelques relations. L’exilé le plus obscur ne renonce jamais à tous rapports avec les siens, ne rompt jamais avec la patrie ; Napoléon, parce qu’il avait ceint le diadème, devait-il étouffer en lui tous les sentiments de l’homme ? Des moyens de communication entre lui et la France furent discutés avant son départ. Les correspondances écrites étaient dangereuses. À qui les confier ? Comment les faire parvenir ? On convint de mots de passe qui serviraient à accréditer les visiteurs en la parole desquels l’Empereur pourrait avoir foi. Ces moyens de correspondance orale ne furent laissés qu’à quelques personnes de son intimité. Nous croyons pouvoir mettre de ce nombre

  1. « Votre mari est un fort brave homme sur le champ de bataille, mais il est plus faible qu’une femme quand il ne voit pas l’ennemi. Il n’a aucun courage moral. » (Lettre de Napoléon à la reine de Naples. — 1813.)
    « Murat, en 1814, avait décidé les événements ; il est une des grandes causes que nous sommes ici. Du reste, la première faute est à moi. Ils étaient plusieurs que j’avais faits trop grands ; je les avais élevés au-dessus de leur esprit... Murat avait un très-grand courage, mais fort peu d’esprit ; la trop grande différence entre ces deux qualités l’explique en entier. » (Mémorial de Sainte-Hélène du comte de Las-Cases.)
  2. Mémorial de Sainte-Hélène.