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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/214

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— 1815 —

« qu’il allait à merveille. » Les politesses d’usage échangées, les deux navires s’éloignèrent, sans que le capitaine Andrieux se doutât du nombre et de la nature des passagers embarqués sur le frêle bâtiment qu’il laissait derrière lui.

Le vent, dans la nuit du 27 au 28, continua d’être favorable ; à la pointe du jour, on reconnut un bâtiment de 74 qui semblait se diriger vers la Corse ; la rencontre pouvait devenir dangereuse, mais le vaisseau poursuivit sa route sans s’occuper de l’Inconstant. À huit heures du matin, la flottille découvrit la côte de Noli ; à midi, elle était à la hauteur d’Antibes ; enfin, le lendemain, 1er mars, à trois heures après midi, elle entra dans le golfe Juan. Le général Drouot, accompagné de quelques officiers et d’un détachement de soldats, aborda le rivage ; Napoléon, se jetant dans un canot, ne tarda pas à les joindre ; le reste de l’expédition suivit ; à cinq heures, le débarquement était achevé.

Le départ de l’île d’Elbe avait été si précipité, que l’Empereur n’avait pas eu le temps de préparer une seule proclamation ; ce fut l’œuvre des deux derniers jours de la traversée. Deux Adresses, l’une au peuple, l’autre à l’armée, furent dictées par Napoléon et copiées par tous les officiers et sous-officiers embarqués avec lui. Le zèle de ces écrivains improvisés triompha de leur petit nombre, de leur inaptitude à ce travail, et des embarras causés par le mouvement des navires ; cinq cents copies se trouvaient faites lorsque la flottille toucha la rive. Quand tout le monde fut à terre, on forma les rangs ; les différents bataillons quittèrent le drapeau blanc parsemé d’abeilles, couleurs de l’île d’Elbe, et arborèrent le drapeau tricolore. Un ban fut ensuite battu, et les capitaines de chaque compagnie, se plaçant au centre, lurent d’une voix forte la proclamation suivante :

À L’ARMÉE.

« Soldats ! nous n’avons pas été vaincus ! Deux hommes, sortis de nos rangs, ont trahi nos lauriers, leur prince, leur bienfaiteur.