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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/216

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— 1815 —

les récompenses, leur affection, sont pour ceux qui les ont servis contre la patrie et contre nous.

Soldats ! venez vous ranger sous les drapeaux de votre chef. Son existence ne se compose que de la vôtre ; ses droits ne sont que ceux du peuple et les vôtres ; son intérêt, son honneur et sa gloire, ne sont autres que votre intérêt, votre honneur et votre gloire. La victoire marchera au pas de charge ; l’aigle avec les couleurs nationales volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame ; alors vous pourrez vous vanter de ce que vous aurez fait : vous serez les libérateurs de la patrie.

Dans votre vieillesse, entourés et considérés de vos concitoyens, ils vous entendront, avec respect, raconter vos hauts faits ; vous pourrez dire avec orgueil : « Et moi aussi je faisais partie de cette Grande Armée qui est entrée deux fois dans les murs de Vienne, dans ceux de Berlin, de Madrid, de Moscou, et qui a délivré Paris de la souillure que la trahison et la présence de l’ennemi y ont empreinte. »

Honneur à ces braves soldats, la gloire de la patrie ! et honte éternelle aux Français criminels, dans quelque rang que la fortune les ait fait naître, qui combattirent vingt-cinq ans avec l’étranger pour déchirer le sein de la patrie !

Napoléon. »

L’éloquence et la mâle énergie de ce langage empruntaient un singulier caractère de grandeur au lieu ou la scène se passait : devant les soldats était la mer et son immensité ; à droite et à gauche, une grève nue ; de tous les côtés, le silence d’une plage déserte. Chaque compagnie répondit à cette lecture par le cri de Vive l’Empereur ! Chaque soldat, électrisé, se tint prêt à braver tous les périls.

Deux routes s’ouvraient à l’Empereur pour arriver à Lyon : l’une par Draguignan et les vallées de la Durance et du Rhône ; l’autre par le pied des Alpes jusqu’à Grenoble. La première était celle qu’il avait suivie après son départ de Fontainebleau ; elle traversait des pays riches, faciles, et une population nombreuse ; mais les insultes qu’il y avait subies et les dangers qu’il y avait courus, un an auparavant, prouvaient que le passage, pour lui, n’y serait pas sans risques. La seconde, fort pénible, courait à travers des contrées montueuses et pauvres, mais dont les habitants, à toutes les époques, avaient