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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 2.djvu/291

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— 1815 —

qui avait fait arrêter et fusiller son fils. » Il accepta seulement pour les siens, leur distribua quarante passe-ports mis à sa disposition, se jeta résolûment dans la campagne, se fit guider, durant six jours, de ferme en ferme, arriva le 30 au-dessous de Nantes, près de la fonderie d’Indret, et, le 31, monta dans une barque qui le conduisit en rade de Paimbœuf, où un bâtiment, frété par des royalistes de la province, l’attendait. À peu de jours de là, le père du duc d’Enghien débarquait en Espagne.

La résistance que le duc de Bourbon était allé provoquer dans les départements de l’Ouest ne devait pas être un effort isolé ; le gouvernement royal avait compté la voir appuyée par le maréchal Augereau, alors investi du commandement militaire de la Normandie.

Chargé de la défense de Lyon en 1814, Augereau, au lieu de résister, avait traité avec les Autrichiens. Annonçant ensuite à son armée l’abdication de l’Empereur, il avait dit : Le lâche n’a pas su mourir en soldat ! Si Napoléon sut oublier l’insulte, il ne put oublier la trahison. Dans ses proclamations du golfe Juan, il disait : « Deux hommes sortis de nos rangs ont trahi nos lauriers, leur pays, leur prince, leur bienfaiteur... La défection du duc de Castiglione livra Lyon sans défense à nos ennemis... » Le lendemain du jour où les journaux de Paris portaient ces paroles accablantes sur tous les points de la France, le maréchal osait publier, dans le chef-lieu de la 14e division militaire, une proclamation où on lisait :

« Soldats ! l’Empereur est dans la capitale ; ce nom, si longtemps le gage de la victoire, a suffi pour dissiper devant lui tous ses ennemis ; un moment la fortune lui fut infidèle ; nous fîmes alors serment de défendre d’autres droits que les siens ; ses droits sont imprescriptibles. Soldats ! dans son absence, vos regards cherchaient en vain sur vos drapeaux blancs quelques souvenirs honorables ; jetez les yeux sur l’Empereur ; à ses côtés brillent d’un nouvel éclat ses aigles immortelles ; rallions-nous sous leurs ailes ; oui, elles seules conduisent à l’honneur et à la victoire : arborons donc les couleurs de la nation. »