Page:Vauvenargues - Œuvres posthumes éd. Gilbert.djvu/262

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246 CORRESPON DANCE. meme il se fait honneur de le préférer quelquefois l mais il ne faut pas que cette injustice vous surprenne ni vous cho- que : de mille personnes qui lisent, il n’y en a peut-etre pas une qui ne préfere, en secret, l'esprit de M, de Fonte· nelle au sublime de M. de Meaux , et Yimagination des Lcltrcs pcrsancs * a la perfection des Lcttres provinciales, ou l’on est étonné de_voir ce que l’art a de plus profond, avec toute la vehémence et toute la naiveté de la nature. C’est que les choses ne font impression sur les hommes que se- · lon la proportion qu’elles ont avec leur genie; ainsi le vrai, le faux, le sublime, le bas, etc., tout glisse sur bien des esprits et ne peut aller jusqu’a eux : c’est par ’ la meme raison qui fait que les choses trop petites par rapport a notre vue lui echappent, et que les trop grandes l’oll`us— quent. D’0l`1 vient que tant de gens encore préferent a la profondeur méthodique de M. Locke, la mémoire féconde et decousue de M. Bayle, qui, n’ayant pas·peut·etre l'esprit assez vaste pour former le plan d’un ouvrage régulier, en- · tasse, dans ses réllexions sur la comete, tant d’idées philoso- phiques, qui n’ont pas un rapport plus nécessaire entre elles que les fades histoires de madame de Villedieu *7 D,Ol`1 vient cela? Toujours du meme fonds : c’est que cette demi-pro- . fondeur de M. Bayle est plus proportionnee aux hommes. Que si l’on se trompe ainsi sur des choses de jugement, combien a plus fo1·te raison sur-des matieres de gout, ou il faut sentir, ce me semble, sans aucune gradation, le senti- 1 0n·sait que cet ouvrage commenca la reputation de Montesquieu. —- G.

  • C’est par, etc. Tel est le texte des dillérentes editions, tel est celui du

‘ manuscrit. Il semble que, dans cette phrase, par est de trop; elle devient tres·claire en supprimant par, ou qui fait, ou, eutln, et. ·— B. . 5 Marie·Catberine Desjardins, marquise de Villedieu et de la Chasse, naquit a Alencon vers 16Iso : ses muvres ont été recueillies en 1702, 10 vol. in-12, et 1721, 12 vol. in·12. On y trouve un grand nombre de romana. Tout y est peint avec vivacite; mais lc pinceau n’est pas asses correct, ni asses discret. Elle ` emploie quelquefois des couleurs trop romanesques, et, dans ses Mémoiru du sérail, il y a trop d'evénements tragiques et invraisemblablm. On a d’elle deux tragedies, Manlius Torqualus et Nitétis, jouees on 1663. Elle monrut en 1683, A Clinchemare, petit village du Maine. — B.