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Page:Vavasseur - chatelaine un jour.djvu/177

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tristes et étonnés, comme si elle eût pu lire les tourments sur le visage de son amie.

Les deux amies partirent, bras dessus bras dessous, entraînées dans la foule qui, dès dix-huit heures trente, jaillit de chaque magasin, bureau ou atelier.

Elles parlèrent d’abord de ces mille petits riens qui agrémentent les pensées quotidiennes de toute femme. Les jupes seront-elles plus ou moins longues cet été, le vert sera-t-il une teinte à la mode, et la coiffure se rapprocherait-elle de celle de nos grand-mères ou de celle de nos trisaïeules ? De toute façon, Lina n’aurait pas les moyens d’acheter une autre robe cette année. Même si le vert s’imposait, Colette se ferait un petit ensemble jaune parce que le vert allait mal à son teint.

Aucune des deux jeunes filles n’attachait d’importance à cette escarmouche avec la mode, car l’une et l’autre savaient que, tout à l’heure, elles en viendraient à une conversation plus grave. Après quelques allusions aux vacances, Lina dit incidemment, ce qui prouvait beaucoup de préméditation :

— Tu es toujours très prise ?

— Non… C’est-à-dire oui, j’ai beaucoup à faire chez moi.

— Tu emportes du travail de ton bureau ?

— Oh ! non, voyons.

Elles remontaient le boulevard Malesherbes et Lina dit encore avec une nuance de moquerie :