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Page:Vavasseur - chatelaine un jour.djvu/234

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Maintenant qu’elle était seule, tout en se répétant machinalement : « Vous n’avez rien à craindre », elle laissait libre cours à ses pensées. Oui, c’était un cauchemar qu’elle avait vécu et ce cauchemar avait tué le rêve…

« Pierre, murmura-t-elle. Pourquoi faut-il que je pense à lui, que je ramène tout à lui… lui qui ne doit que me mépriser, maintenant. »

Elle retrouva la rue du Mont-Cenis avec une joie mêlée d’amertume, à l’image de son état d’âme, né d’un péril écarté et d’un bonheur perdu.

Par une de ces surprises que ménage toujours le hasard, la concierge ne la vit pas entrer et Colette s’en félicita. Elle avait hâte d’être chez elle, de s’enfermer dans sa coquille, d’y cacher sa peine, de pouvoir y libérer ses larmes.

« Vous n’avez rien à craindre. »

Elle se répétait inlassablement les paroles rassurantes du commissaire. Non qu’elle eût encore besoin de se rassurer, mais pour s’apaiser, s’endormir, comme une mère répète à son enfant le refrain d’une berceuse.

Son logement lui sembla minuscule.

Les hautes salles de Grandlieu, la perspective du parc l’avaient habituée à l’espace.

Colette se sentit attirée par la fenêtre ouverte sur la Butte et elle resta longtemps, collée à la vitre comme un papillon cherchant l’espace et la lumière.

« Je ne pourrai plus vivre ici. Il me semble que j’y étoufferais sous le poids des souvenirs. »