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les villes à pignons
Les deux Terlink, frères ennemis, luttent

À qui dévorera en quatre coups de dents,
Un boudin long comme une flûte ;
Ils l’avalent, le front têtu, les yeux ardents,
Sans un seul spasme,

Et la salle rayonne et bout d’enthousiasme.


Mais le sonneur qu’on avait cru

À bout d’entrain et de frairie
Se rengorge, se carre, et tout à coup parie
Qu’il mangera un jambon cru,
Sans boire, en vingt minutes.
On l’en défie avec fureur.
Alors, le haut et violent sonneur
Fait apporter l’objet de la dispute,
Et découpant de clairs et savoureux morceaux
Sous la couenne rugueuse et saure,
Se met à l’œuvre et bellement dévore,

Tel un héros.


Les yeux rieurs et la bouche torchée,

Il engloutit, à quadruples bouchées,
Rompant un coin de pain, mêlant le maigre au gras,
Crispant sa lèvre ardente et goguenarde
Et maculant, de temps en temps, le bord du plat

D’un paquet jaune de moutarde.