Page:Verhaeren - Les Visages de la vie, 1899.djvu/24

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À l’infini du monde,
À son mystère, à ses conflits ;
Nourrir, avec ferveur, les angoisses profondes
Dont s’effare l’instinct, mais dont vibre l’esprit ?
Mais, à travers des mers de lassitudes,
Plonger pour arracher aux solitudes
Océanes, leurs fleurs,
Qui donc ne sentirait son cœur,
Qui donc ne sentirait son âme élucidée
S’illuminer à cette idée ?

Ô la haute existence infrangible et tragique
Jamais à bout de son effort,
Qui se replie et se cramponne et qui se tord
Sous la voracité des destins héroïques !

La force la plus belle est la force qui pleure
Et qui reste tenace et marche d’un pas droit,
Dans sa propre douleur, qu’elle conçoit
Sublime et nécessaire, à chaque appel de l’heure.

Il faut vouloir l’épreuve et non la gloire ;
Casque fermé, mais pennon haut,
Prendre chaque bonheur d’assaut,
Par à travers une victoire.