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Page:Verhaeren - Les Visages de la vie, 1899.djvu/48

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Et dépeçaient, en des fêtes, envenimées
De disputes, de cris, de sang et de fumées.
Sous les couches du terreau lourd et gras,
Les silex clairs, les os géants, les dents énormes
Dorment,
Restes blanchis de meurtre ou de combat.
Des blocs immobiles, ainsi que des statues,
Que les gouttes de l’eau tombante ont revêtues
De tuniques de nacre et d’écailles d’argent,
S’y regardent, depuis mille et mille ans.
Le silence y séjourne — et, seul, on y entend
Sur ces pierres de haut en bas luisantes,
Le même choc des gouttes d’eau tombantes,
Une à une, depuis mille ans.

Ce mont,
Avec son ombre et ses ténèbres,
Blottis, comme une armée, à l’horizon,
S’épand, vers les hameaux et leurs clochers funèbres.

Un murmure lointain de songe et de légende
Circule, autour de lui, la nuit,
Lorsque, de loin, son front commande
Aux souvenirs, dans les veillées.
On songe alors à ses grottes taillées,
Où travaillaient des nains, sur des enclumes d’or,