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JADIS ET NAGUÈRE


« Leurs cheveux que le vent fouette
Sous leurs casques battaient, pareils
Aux ailes de quelque mouette,
Pâles avec des tons vermeils.

« Ils chantaient des choses hautaines !
Ça parlait de libres combats,
D’amour, de brisements de chaînes
Et de mauvais dieux mis à bas. —

« Ils passèrent. Quand leur cohorte
Ne fut plus là-bas qu’un point bleu,
Nous nous arrangeâmes en sorte
De les suivre en nous risquant peu.

« Longtemps, longtemps rasant la terre,
Discrets, loin derrière eux, tandis
Qu’ils allaient au pas militaire,
Nous marchâmes par rang de dix.

« Passant les fleuves à la nage
Quand ils avaient rompu les ponts.
Quelques herbes pour tout carnage.
N’avançant que par faibles bonds,

« Perdant à tout moment haleine…
Enfin une nuit ces démons
Campèrent au fond d’une plaine
Entre des forêts et des monts,