Avec leur intelligence profonde de la liberté, ils avaient bien compris que c’est le caractère autoritaire de l’administration de la justice qui est la racine de tout despotisme, et tandis que toujours auparavant on s’était appliqué et que toujours on s’est appliquée depuis à tenir le pouvoir judiciaire hors du peuple pour le rendre plus redoutable, ils mirent tous leurs efforts, au contraire, à le placer dans le peuple même pour le rendre plus légitime et moins dangereux.
C’est ainsi qu’à côté des juges, chargés d’appliquer la loi, ils placèrent les jurés, chargés de prononcer sur le fait.
Les jurés sont de simples citoyens, pris au hasard, appelés à constater le fait qui est l’objet de l’accusation, de telle sorte qu’il ne reste plus aux juges, les faits étant constatés, qu’à appliquer la loi.
Les jurés offrent ainsi la plus grande garantie aux accusés ; ce sont des hommes du même état, du même intérêt que les parties qui, jurés aujourd’hui, peuvent demain passer à leur tour devant le jury : c’est la réalisation de ce droit légitime qui doit appartenir à tout citoyen, de n’être jugé que par ses pairs.
L’institution est ancienne, ancienne comme le sentiment de la justice. Elle était en vigueur, à l’origine de la monarchie française, chez les Francs