et une petite colonne, élevée vers le sud-ouest, marque la direction de la Mecque. Mme de Ujfalvy-Bourdon a justement comparé cette partie de la mosquée de Gour-Émir à un sanctuaire, et c’est l’impression que nous avons éprouvée. Cette impression a pris une teinte plus religieuse encore, lorsque, par un escalier étroit et obscur, nous sommes descendus jusqu’à la crypte qui renferme les tombeaux des femmes de Tamerlan et de ses filles.
« Mais enfin, ce Tamerlan, demande M. Caterna, ce Tamerlan dont il est toujours question…
— Ce Tamerlan, répondit le major Noltitz, fut l’un des plus grands conquérants du monde, le plus grand même, si l’on mesure la grandeur à l’étendue des conquêtes. L’Asie à l’est de la mer Caspienne, la Perse et les provinces au nord de sa frontière, la Russie jusqu’à la mer d’Azof, l’Inde, la Syrie, l’Asie Mineure, enfin la Chine sur laquelle il jeta deux cent mille hommes, il eut un continent tout entier pour théâtre de ses guerres.
— Et il était boiteux !… fit observer Mme Caterna.
— Oui, madame, comme Genséric, comme Shakespeare, comme Byron, comme Walter Scott, comme Talleyrand, ce qui ne l’a pas empêché de faire beaucoup de chemin. Mais, fanatique et sanguinaire, par exemple ! L’histoire affirme qu’il fit massacrer à Delhi cent mille captifs, et ériger à Bagdad un obélisque de quatre-vingt mille têtes.
— J’aime mieux celui de la place de la Concorde, répondit M. Caterna, et puis il est d’un seul morceau. »
Sur cette observation, nous quittons la mosquée de Gour-Émir, et, vu qu’il est temps de « rappliquer », dit notre trial, l’arba se hâte de se diriger vers la gare.
Pour mon compte, en dépit des observations du couple Caterna, j’étais tout à ce sentiment si pénétrant de la couleur locale que donnent les merveilles de Samarkande, lorsque je fus brutalement ramené à la réalité moderne.
Dans les rues, oui ! dans les rues voisines de la gare, en pleine