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PREMIER VOYAGE AUTOUR DU MONDE

lerons de l’expédition de Bougainville ; nous ne nous y arrêterons donc pas. Après une navigation de vingt-deux jours à travers cette succession de goulets et de bras de mer, larges tantôt d’une lieue, tantôt de quatre, qui s’étend sur une longueur de quatre cent quarante milles et qui a reçu le nom de détroit de Magellan, la flotte déboucha sur une mer immense et profonde.

La joie fut générale, lorsqu’enfin on vit atteint le but de tant et de si longs efforts. Désormais la route était ouverte, et les prévisions si habiles de Magellan s’étaient réalisées.

Rien n’est plus extraordinaire que la navigation de Magellan dans cet océan qu’il appela Pacifique, parce que, pendant près de quatre mois, il n’y fut assailli par aucune tempête. Les privations qu’eurent à supporter les équipages pendant ce long espace de temps furent excessives. Le biscuit n’était plus qu’une poussière mêlée de vers, et l’eau corrompue exhalait une odeur insupportable. Il fallut, pour ne pas mourir de faim, manger les souris, se nourrir de sciure de bois et ronger tous les cuirs qu’il fut possible de trouver. Comme il était facile de le prévoir, dans ces conditions, les équipages furent décimés par le scorbut. Dix-neuf hommes moururent, et une trentaine furent atteints aux bras et aux jambes de violentes douleurs qui les firent longtemps souffrir. Enfin, après avoir parcouru plus de 4,000 lieues sans avoir rencontré une seule île, dans une mer où l’on devait découvrir tant d’archipels si peuplés, on tomba sur deux îles désertes et stériles,