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Page:Verne - L'Agence Thompson and C°, Hetzel, 1907.djvu/191

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UNE NOCE À SAINT-MICHEL.

Thargela. Cette invitation fut mieux accueillie qu’on n’eût pu le craindre de ces touristes irrités. Obligés de rester à bord toute cette longue journée, ils acceptèrent avec plaisir la perspective d’une promenade nocturne et d’un spectacle original. C’est donc à peu près au complet que, vers neuf heures, ils entrèrent dans la salle où Thargela célébrait par un bal son union avec son cher Joachimo, et dans laquelle une centaine d’hommes et femmes dansaient à l’aise aux sons d’une musique endiablée.

Des acclamations accueillirent les Anglais. N’étaient-ils pas les véritables artisans du bonheur des deux jeunes gens ? Sans leur présence, la noce n’eût pas été complète. Aussi, leur fit-on fête, et de bon cœur.

Un instant suspendues, les danses reprirent bientôt. Les quadrilles succédaient aux polkas, les valses aux mazurkas. Mais vers onze heures un cri général s’éleva :

« La landun ! la landun ! »

À ce signal, tous firent cercle, et Thargela et Joachimo se mirent en devoir de satisfaire leurs amis, en exécutant cette danse nationale, pour laquelle les Açoriens de toutes classes ont une véritable passion.

La landun est sœur jumelle du boléro espagnol. Ce sont mêmes piétinements, mêmes renversements souples, mêmes mines mutines et provocantes. Il est à croire que Thargela exécuta habilement cette difficile danse de caractère, car de longs applaudissements saluèrent le jeune couple quand les castagnettes firent silence.

Vers minuit, la fête battait son plein. Le vin de Fayal avait porté au comble la gaieté des danseurs. Les passagers du Seamew se disposèrent à partir.

Auparavant cependant, Alice Lindsay, après avoir pris l’avis de ses compagnons, résolut de mettre à exécution une pensée qui lui était venue. Puisque le hasard les avait mêlés aux destinées de ces jeunes gens, pourquoi, par un élan de cœur, ne pas