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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

puis une seconde nuit a commencé qui s’achève, car déjà une lueur vague rougeoie le ciel à l’Orient.

Pendant ces longues heures, pas un mouvement n’est venu dire s’il reste à Robert un souffle de vie. D’ailleurs, vivrait-il, le soleil, en versant sur lui pour la deuxième lois ses rayons enflammés, va certainement marquer son dernier jour.

Mais, quelque chose a bougé auprès du corps immobile. Un animal, dont on ne saurait reconnaître l’espèce dans l’ombre encore épaisse, s’agite et gratte le sable sur lequel le visage repose. L’air, désormais, peut librement arriver jusqu’aux poumons, s’ils ont encore la faculté de respirer.

Le résultat de ce changement ne se fait pas attendre. Robert pousse quelques gémissements confus, puis essaye de se soulever. Une douleur cruelle dans le bras gauche le rejette haletant sur le sol.

Cependant, il a eu le temps de reconnaître son sauveur.

— Artimon ! soupire-t-il, près de s’évanouir de nouveau.

À l’appel de son nom, Artimon a répondu par des jappements délirants. Il se multiplie, il s’empresse. Sa langue moite et tiède se promène sur le visage du blessé, qu’il débarrasse de l’amalgame de sable et de sueur qui s’y est accumulé.

Maintenant, la vie afflue dans le cœur de Robert. Le sang se presse dans ses artères, ses tempes battent, les forces reviennent au galop. En même temps, le souvenir renaît, et il se rappelle les circonstances de sa chute.

Avec précautions, cette fois, il renouvelle son effort, et, bientôt, le voilà à genoux. Puis il se traîne au bord de la mer, et la fraîcheur de l’eau achève de le ranimer.

Le jour s’est complètement levé. Au prix de mille peines, il réussit alors à se dévêtir, et il examine sa blessure. Elle n’est pas grave. La balle s’est aplatie sur la clavicule sans la briser, et elle tombe à la première tentative. L’écrasement d’un nerf a seul causé l’effroyable douleur, et l’évanouissement n’a été prolongé que par la perte de sang et la diminution de respiration produite