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Page:Verne - L’Étoile du sud, Hetzel, 1884.djvu/155

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UN COMPLOT.

Tout à coup, Annibal Pantalacci releva brusquement la tête et sonda du regard les ténèbres qui l’entouraient.

« N’avez-vous rien vu ? demanda-t-il à voix basse. Il m’a semblé apercevoir une ombre derrière ce baobab ! »

James Hilton regarda à son tour ; mais, si perçant que fût son regard il n’aperçut rien de suspect aux environs du campement.

« Ce n’est rien ! dit-il. Du linge que le Chinois a mis à blanchir à la rosée ! »

Bientôt la conversation fut reprise entre les deux complices, mais à mi-voix, cette fois.

« Je pourrais enlever les cartouches de son fusil, sans qu’il y prît garde ! disait Annibal Pantalacci. Puis au moment d’attaquer un éléphant, je tirerais un coup de feu derrière lui, de manière que la bête l’aperçût à cet instant… et ce ne serait pas long !

— C’est peut-être bien délicat ce que vous proposez ! objectait faiblement James Hilton.

— Bah ! laissez-moi faire et vous verrez que cela ira tout seul ! » répliqua le Napolitain.

Une heure plus tard, lorsqu’il vint reprendre sa place auprès des dormeurs, sous la bâche, Annibal Pantalacci eut soin d’enflammer une allumette, afin de s’assurer que personne n’avait bougé. Cela lui permit de constater que Cyprien, Bardik et le Chinois étaient profondément endormis.

Ils en avaient l’air tout au moins. Mais, si le Napolitain avait été plus avisé, il aurait peut-être reconnu dans le ronflement sonore de Lî quelque chose d’artificiel et de sournois.

Au point du jour, tout le monde était sur pied. Annibal Pantalacci sut profiter du moment où Cyprien était allé vers le ruisseau voisin pour se livrer à ses ablutions matinales, et il opéra la soustraction des cartouches de son fusil. Ce fut l’affaire de vingt secondes. Il était bien seul. À ce moment, Bardik faisait le café, le Chinois rassemblait le linge qu’il avait exposé à la rosée nocturne sur sa fameuse corde tendue entre deux baobabs. Bien certainement, personne n’avait rien vu.

Le café pris, on partit à cheval, laissant le wagon et les bestiaux sous la garde de Bardik.

Lî avait demandé à suivre les cavaliers et s’était armé seulement du couteau de chasse de son maître.

En moins d’une demi-heure, les chasseurs arrivèrent au point où, la veille