Page:Verne - L’Étonnante Aventure de la mission Barsac, parue dans Le Matin, avril à juillet 1914.djvu/65

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Enfin nous partons avec trois heures de retard.

Le phénomène de cette nuit fait, bien entendu, l’objet de toutes les conversations, mais personne ne peut réussir à l’expliquer. Peu à peu, cependant, on commence à parler d’autre chose, quand, à deux kilomètres environ du campement que nous venons de quitter, le capitaine Marcenay, qui marche en tête, constate que le sol est creusé par des ornières longues d’une cinquantaine de mètres, et orientées de l’ouest à l’est. Ces ornières, profondes de dix centimètres environ du côté ouest, s’effacent insensiblement du côté est. Elles sont au nombre de dix réunies en cinq groupes de deux.

Ont-elles un rapport quelconque avec le phénomène de cette nuit ? On est d’abord tenté de répondre : non.

Et pourtant il y a cette direction commune de l’ouest à l’est ; il y a ces nombres semblables : cinq groupes d’ornières, cinq ronflements successifs…

Alors ?…

Alors, je ne sais pas.

Amédée Florence.


VII

à sikasso


La mission Barsac parvint le 12 janvier à Sikasso. Elle avait donc parcouru en moins de six semaines, soit à raison de vingt-cinq kilomètres par jour en moyenne, les onze cents kilomètres séparant de la côte cette ancienne capitale du Kénédougou, devenue par la suite la dernière forteresse de Samory.

L’Expansion française ayant cessé, comme on l’a dit, de recevoir les articles d’Amédée Florence, après le troisième, envoyé par celui-ci le surlendemain de son départ de Kankan, on n’aurait, à dater de ce jour, aucun renseignement touchant la marche de la mission, sans le carnet sur lequel l’habile reporter consignait au jour le jour ses remarques et observations. Ce carnet, l’auteur du présent récit l’a sous les yeux et ne manquera pas d’y faire, le cas échéant, de larges emprunts.

De Kankan à Sikasso, le voyage paraît avoir été monotone et sans intérêt. Outre quelques plaisanteries à propos des distractions de Saint-Bérain et la relation minutieuse des petits incidents journaliers, incidents dont trop d’exemples ont été donnés au lecteur pour qu’il soit utile d’en citer d’autres, Amédée Florence se borne à décrire la route, plate jusqu’à Tiola, très accidentée à partir de cette bourgade, et à constater brièvement que Tchoumouki, continuant à fuir la compagnie de son camarade Tongané, paraît se lier avec le guide de tête Moriliré. Il ne fait, d’ailleurs, à ce sujet, aucune réflexion, et vraiment il n’y avait pas lieu d’en