Mais Hadjar sut contenir les fougueuses passions de ses Touareg. Devant la menace de la reprise des travaux, ce qui pressait le plus, c’était de garantir la sécurité des oasis de l’angle sud-ouest du chott. Il ne fallait pas permettre aux étrangers de transformer le Melrir en un vaste bassin navigable que les bâtiments parcourraient en tous sens. Donc, tout d’abord, bouleverser les travaux du canal.
Mais, en même temps, Hadjar apprit que l’expédition, sous les ordres du capitaine Hardigan, ferait halte avant quarante-huit heures à l’extrémité du canal, où elle devait en rencontrer une autre venue de la province de Constantine au-devant d’elle.
De là cette attaque que Hadjar, en personne, dirigea contre la dernière section, et qui venait de disperser les premiers ouvriers de la Société. Plusieurs centaines de Touareg s’y étaient occupés. Puis, le canal à demi comblé, ils avaient repris la route de Zenfig.
Et, si Mézaki s’était trouvé là, c’est que son chef l’y avait laissé, et si cet homme avait déclaré que Hadjar n’était pas intervenu dans l’attaque du chantier, c’était pour tromper le capitaine, et, s’il avait affirmé que les ouvriers étaient alors réfugiés à Gizeb, c’était pour qu’une partie du détachement y fût envoyée, et, enfin, si actuellement l’ingénieur, le capitaine et quatre de leurs compagnons étaient prisonniers de Hadjar, c’est que, surpris par une trentaine de Touareg, apostés sous les ordres de Sohar aux environs de Goléah, ils avaient été dirigés vers l’oasis de Zenfig, avant d’avoir été rejoints par les spahis du lieutenant Villette.
En même temps que leurs six prisonniers, les Touareg s’étaient emparés des chevaux restés au campement, ceux de l’ingénieur, de l’officier, du brigadier et des deux spahis. M. François, qui jusqu’alors avait pris place dans l’un des chariots de l’expédition, depuis le départ de Gabès, n’était point monté. Mais, à deux cents pas du chantier, attendaient les chevaux et les méharis qui avaient amené la bande des Touareg.