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la maison à vapeur.

À onze heures, ce jour-là, apparut dans la plaine un curieux mausolée, d’architecture mongole, qui a été dressé en l’honneur de deux saints personnages de l’Islam, Kassim-Soliman, père et fils. Une demi-heure après, c’était l’importante forteresse de Chunar, dont les pittoresques remparts couronnent un imprenable roc, élevé à pic de cent cinquante pieds au-dessus du Gange.

Il ne fut pas question de faire halte pour visiter cette forteresse, une des plus importantes de la vallée du Gange, située de manière à pouvoir économiser la poudre et les boulets en cas d’attaque. En effet, toute colonne d’assaut qui chercherait à atteindre ses murailles, serait écrasée par une avalanche de rochers disposés à cet effet.

Au pied s’étend la ville qui porte son nom, et dont les coquettes habitations disparaissent sous la verdure.

À Bénarès, on l’a vu, il existe plusieurs lieux privilégiés, qui sont considérés par les Indous comme les plus sacrés du monde. À bien compter, on en trouverait des centaines de ce genre, à la surface de la péninsule. La forteresse Chunar, elle aussi, possède une de ces miraculeuses stations. Là, on vous montre une plaque de marbre, sur laquelle un dieu quelconque vient régulièrement faire sa sieste quotidienne. Il est vrai que ce dieu est invisible. Aussi n’avons-nous pas cherché à le voir.

Le soir, le Géant d’Acier faisait halte près de Mirzapore pour y passer la nuit. Si la ville n’est point dépourvue de temples, elle a des usines aussi, et un port de chargement pour le coton que produit ce territoire. Ce sera, un jour, une riche cité commerçante.

Le lendemain, 25 mai, vers deux heures après midi, nous franchissions à gué la petite rivière la Tonsa, qui, à cette époque, n’avait pas un pied d’eau. À cinq heures, était dépassé le point où se soude le grand embranchement de Bombay à Calcutta. Presque à l’endroit où la Jumna tombe dans le Gange, nous admirions le magnifique viaduc en fer, qui mouille ses seize piles, hautes de soixante pieds, dans les eaux de ce superbe affluent. Arrivés au pont de bateaux, long d’un kilomètre, qui réunit la rive droite à la rive gauche du fleuve, nous le traversions sans trop de difficultés, et, dans la soirée, nous venions camper à l’extrémité de l’un des faubourgs d’Allahabad.

La journée du 26 devait être consacrée à la visite de cette importante ville, de laquelle rayonnent les principaux chemins de fer de l’Indoustan. Elle