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allahabad.

est assise dans une admirable position, au milieu du plus riche territoire, entre les deux bras de la Jumna et du Gange.

La nature a certainement tout fait pour qu’Allahabad soit la capitale de l’Inde anglaise, le centre du gouvernement, la résidence du vice-roi. Il n’est donc pas impossible qu’elle le devienne un jour, si les cyclones jouent quelques mauvais tours à Calcutta, la métropole actuelle. Ce qui est certain, c’est que quelques bons esprits ont déjà entrevu et prévu cette éventualité. Dans ce grand corps qui s’appelle l’Inde, Allahabad est placée là où est le cœur, comme Paris est au cœur de la France. Il est vrai que Londres n’est pas au centre du Royaume-Uni, mais aussi Londres n’a-t-elle pas sur les grandes cités anglaises, Liverpool, Manchester, Birmingham, la prééminence de Paris sur toutes les autres villes de France.

« Et à partir de ce point, demandai-je à Banks, allons-nous marcher directement dans le nord ?

– Oui, répondit Banks, ou du moins presque directement. Allahabad est, dans l’ouest, la limite de cette première partie de notre expédition.

– Enfin ! s’écria le capitaine Hod, les grandes villes, c’est bien, mais les grandes plaines, les grandes jungles, c’est mieux ! À continuer de suivre ainsi les railways, nous finirions par rouler dessus, et notre Géant d’Acier passerait à l’état de simple locomotive ! Quelle déchéance !

– Rassurez-vous, Hod, répondit l’ingénieur, cela n’arrivera pas. Nous allons nous aventurer bientôt sur vos territoires de prédilection.

– Ainsi, Banks, nous irons droit à la frontière indo-chinoise, sans traverser Lucknow ?

– Mon avis est d’éviter cette ville, et surtout Cawnpore, trop pleine de funestes souvenirs pour le colonel Munro.

– Vous avez raison, répliquai-je, et nous n’en passerons jamais assez loin !

– Dites-moi, Banks, demanda le capitaine Hod, pendant votre visite à Bénarès, vous n’avez rien appris sur Nana Sahib ?

– Rien, répondit l’ingénieur. Il est probable que le gouverneur de Bombay aura été une fois de plus induit en erreur, et que le Nana n’a jamais reparu dans la présidence de Bombay.

– C’est probable, en effet, répondit le capitaine, sans quoi l’ancien rebelle aurait déjà fait parler de lui !

– Quoi qu’il en soit, dit Banks, j’ai hâte de quitter cette vallée du Gange, qui a été le théâtre de tant de désastres pendant l’insurrection des Cipayes,