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le lac puturia

En effet, vers sept heures, un léger brouillard commença à se lever sur le lac. On se rappelle que de fortes brumes couraient déjà dans les hautes zones du ciel pendant la nuit précédente. Ici, une modification s’était produite, due aux différences de localités. Si, au campement des éléphants, ces vapeurs s’étaient maintenues à quelques centaines de pieds au-dessus du sol, il n’en fut pas de même à la surface du Puturia, grâce à l’évaporation des eaux. Après une journée assez chaude, il y eut confusion entre les hautes et les basses couches de l’atmosphère, et tout le lac ne tarda pas à disparaître sous un brouillard, peu intense d’abord, mais qui s’épaississait d’instant en instant.

Ceci était donc, comme l’avait dit Banks, une complication dont il y avait lieu de tenir compte.

Ainsi qu’il l’avait également annoncé, vers sept heures et demie, les derniers gémissements du Géant d’Acier se firent entendre, les coups de piston devinrent moins rapides, les pattes articulées cessèrent de battre l’eau, la pression descendit au-dessous d’une atmosphère. Plus de combustible, ni aucun moyen de s’en procurer.

Le Géant d’Acier et l’unique voiture qu’il remorquait alors flottaient paisiblement sur les eaux du lac, mais ne se déplaçaient plus.

Dans ces conditions, au milieu des brumes, il eût été difficile de relever exactement notre situation. Pendant le peu de temps que la machine avait fonctionné, le train s’était dirigé vers la rive sud-est du lac, afin d’y chercher un point de débarquement. Or, comme le Puturia affecte la forme d’un ovale assez allongé, il était possible que Steam-House ne fût plus trop éloigné de l’une ou l’autre de ses rives.

Il va sans dire que les cris des éléphants, qui nous avaient poursuivis pendant une heure environ, maintenant éteints dans l’éloignement, ne se faisaient plus entendre. Nous causions donc des diverses éventualités que nous réservait cette nouvelle situation. Banks fit appeler Kâlagani, qu’il tenait à consulter. L’Indou vint aussitôt et fut invité à donner son avis.

Nous étions réunis alors dans la salle à manger, qui, recevant le jour par la claire-voie supérieure, n’avait point de fenêtres latérales. De cette façon, l’éclat des lampes allumées ne pouvait se transmettre au dehors. Précaution utile, en somme, car mieux valait que la situation de Steam-House ne pût être connue des rôdeurs qui couraient peut-être les rives du lac.