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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

rapporter un seul cliché !… Jamais je n’aurais osé me représenter devant le ministre de l’Instruction publique ! »

On conçoit cette joie du naturaliste, et aussi la satisfaction des autres passagers de la Gallinetta et de la Moriche, en retrouvant à bord leur matériel de voyage, sans parler des armes qu’ils ramassèrent dans la clairière.

À présent les pirogues pouvaient rester sans rien craindre près de l’embouchure du rio Torrida, sous la garde des équipages. Lorsque l’heure serait venue de se rembarquer, — tout au moins dans la Moriche, — Jacques Helloch et Germain Paterne n’auraient qu’à monter à bord.

En somme, il n’était pas encore question de départ. Le Père Esperante allait ramener à Santa-Juana sa fille Jeanne, le sergent Martial, le jeune Gomo et le plus grand nombre de ses Indiens. Et comment les deux Français n’eussent-ils pas accepté de passer quelques jours, ou même quelques semaines, à la Mission, dans la maison d’un compatriote ?…

Ils acceptèrent.

« Il le faut, fit observer Germain Paterne à Jacques Helloch. Nous vois-tu retourner en Europe sans avoir visité Santa-Juana !… Jamais je n’oserais me présenter devant le ministre de l’Instruction publique, — ni toi, Jacques…

— Ni moi, Germain…

— Parbleu ! »

Pendant cette journée, les repas furent pris en commun sur les réserves des pirogues et les approvisionnements apportés de la bourgade. Le sergent Martial seul y manqua, mais il était si heureux, si heureux d’avoir retrouvé son colonel, — même sous la robe du Père Esperante !… Le bon air de Santa-Juana le rétablirait en quelques jours !… Il n’en doutait pas…

Il va sans dire que Jacques Helloch et Jeanne avaient dû faire au colonel de Kermor un récit détaillé du voyage. Il les écoutait, il observait, il devinait sans peine les sentiments dont le cœur de Jac-