Page:Verne - Le Volcan d’or version originale.djvu/65

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Le Scout était un homme de cinquante ans, taille moyenne, corps de fer, barbe qui grisonnait aux joues, cheveux ras, rudes et gros, regard ferme et pénétrant. Une parfaite honnêteté se lisait sur sa physionomie sympathique. Pendant qu’il exerçait son métier d’éclaireur dans l’armée canadienne, il avait acquis les plus rares qualités de circonspection, de vigilance et de prudence. Il n’eût pas été facile à tromper, étant réfléchi, méthodique, plein de ressources. En même temps, philosophe à sa manière et prenant la vie par ses bons côtés, et n’est-il pas vrai qu’elle en a toujours ? Très satisfait de son métier, elle ne lui était jamais venue, cette ambition d’imiter ceux qu’il conduisait aux territoires aurifères, et ne savait-il pas que la plupart succombaient à la peine, ou revenaient de ces dures campagnes plus misérables après qu’avant ?…

Ben Raddle fit donc connaître au Scout son projet de partir pour Dawson-City dans le plus court délai. S’il s’adressait à lui, c’est qu’on lui avait dit à Montréal qu’il ne pourrait choisir un meilleur guide à Skagway.

« Bien, monsieur, répondit le Scout, vous me demandez de vous transporter à Dawson-City. C’est mon métier de guider les voyageurs, et j’ai le personnel et le matériel indispensables à ce voyage.

— Je le sais, Scout, dit Ben Raddle, et je sais aussi que l’on peut s’en rapporter à vous…

— Vous ne comptez rester que quelques semaines à Dawson-City ? demanda Bill Stell.

— C’est plutôt probable.

— Il ne s’agit pas alors d’exploiter un claim ?…

— Non, celui que nous possédons, mon cousin et moi, nous est venu par héritage. Une proposition d’achat nous a été faite ; mais avant de l’accepter, nous avons voulu nous rendre compte de sa valeur.

— C’est prudent, monsieur Raddle, car, dans ces sortes d’affaires, il n’est de ruses qu’on n’emploie pour tromper le monde, et il faut se défier…

— C’est ce qui nous a décidés à entreprendre ce voyage au Klondike.

— Et lorsque vous aurez vendu votre claim, vous reviendrez à Montréal ?…

— C’est notre intention, et, après nous avoir conduits à l’aller, Scout, nous vous demanderons de nous conduire au retour.

— Nous pourrons nous entendre à ce sujet, répondit Bill Stell, et comme je n’ai pas l’habitude de surfaire, voici dans quelles conditions je traiterai avec vous, monsieur Raddle. »

Il s’agissait, en somme, d’un voyage dont la durée serait de trente à trente-cinq jours, pour lequel le Scout aurait à fournir les chevaux ou mules,


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