Page:Verne - Les Enfants du capitaine Grant.djvu/124

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l’action des vents du nord. On marcha rapidement néanmoins, et vers six heures les Cordillères, éloignées de quarante milles, présentaient un aspect noirâtre déjà perdu dans les brumes du soir.



Les voyageurs étaient un peu fatigués de leur route qui pouvait être estimée à trente-huit milles. Aussi virent-ils avec plaisir arriver l’heure du coucher. Ils campèrent sur les bords du rapide Neuquem, un rio torrentueux aux eaux troubles, encaissé dans de hautes falaises rouges. Le Neuquem est nommé Ramid ou Comoe par certains géographes, et prend sa source au milieu de lacs que les Indiens seuls connaissent.

La nuit et la journée suivante n’offrirent aucun incident digne d’être relaté. On allait vite et bien. Un sol uni, une température supportable rendaient facile la marche en avant. Vers midi, cependant, le soleil fut prodigue de rayons très-chauds. Le soir venu, une barre de nuages raya l’horizon du sud-ouest, symptôme assuré d’un changement de temps. Le Patagon ne pouvait s’y méprendre, et du doigt il indiqua au géographe la zone occidentale du ciel.

« Bon ! je sais, » dit Paganel, et s’adressant à ses compagnons : « Voilà, ajouta-t-il, un changement de temps qui se prépare. Nous allons avoir un coup de Pampero. »

Et il expliqua que ce Pampero est fréquent dans les plaines argentines. C’est un vent du sud-ouest très-sec. Thalcave ne s’était pas trompé, et pendant la nuit, qui fut assez pénible pour des gens abrités d’un simple poncho, le Pampero souffla avec une grande force. Les chevaux se couchèrent sur le sol, et les hommes s’étendirent près d’eux en groupe serré.