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mathias sandorf.

En une heure et demie, le train eut atteint cette ville, située presque au bout du talon de la botte italienne, sur ce canal qui forme l’étroite entrée de l’Adriatique. Là, dans ce port presque abandonné, le docteur put faire le prix avec le patron d’un chébec, prêt à partir pour Smyrne, où il réexportait un chargement de petits chevaux albanais qui n’avaient pas trouvé acquéreur à Otrante.

Le lendemain, le chébec prenait la mer, et le docteur voyait s’abaisser sous l’horizon le phare de Punta di Luca, à l’extrême pointe de l’Italie, tandis que, sur la côte opposée, les monts Acrocérauniens s’effaçaient dans les brumes. Quelques jours plus tard, après une traversée sans incidents, le cap Matapan était doublé à l’extrémité de la Grèce méridionale, et le chébec arrivait au port de Smyrne.

Le docteur avait succinctement raconté à Pierre cette partie de son voyage, puis aussi, comment il apprit par les journaux cette mort imprévue de sa petite fille, qui le laissait seul au monde !

« Enfin, dit-il, j’étais sur cette terre de l’Asie Mineure, où, pendant tant d’années, j’allais vivre inconnu. C’est aux études de médecine, de chimie, de sciences naturelles, dont je m’étais nourri pendant ma jeunesse dans les écoles et universités de la Hongrie — où ton père professait avec tant de