Page:Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 2.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

228
mathias sandorf.

la fange, des mendiants avec toute leur variété de plaies ou difformités fructueuses, des hommes, portefaix ou pêcheurs, à physionomie farouche, capables de tous les mauvais coups à porter ou à faire, — puis, à travers ce grouillement humain, quelques flegmatiques policemen, habitués à ce monde invraisemblable, non seulement familiarisés mais familiers avec cette tourbe ! Une vraie Cour des Miracles, enfin, mais transportée au milieu d’une substruction étrange, dont les dernières ramifications aboutissent à des soupiraux grillagés, ouverts dans l’épaisseur des courtines, au ras de ce quai de la Quarantaine, inondé de soleil et de brise marine.

C’était dans une des maisons de ce quartier, au plus haut étage, que demeuraient Maria et Luigi Ferrato. Deux chambres seulement. Le docteur fut frappé de l’indigence que révélait ce pauvre logement, mais aussi de sa propreté. On y retrouvait la main de la ménagère soigneuse, qui entretenait jadis la maison du pêcheur de Rovigno.

À l’entrée du docteur et de Pierre Bathory, Maria se leva. Puis, s’adressant à son frère :

« Mon enfant !… mon Luigi ! » s’écria-t-elle.

On comprend ce qu’avaient dû être ses angoisses pendant cette tourmente de la nuit dernière.