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Page:Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 2.djvu/95

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complications.

son abominable délation fût dévoilé un jour, rien ne semblait devoir apporter un trouble dans son existence.

Toutefois, en face de lui, comme un reproche muet, mais vivant, il y avait Mme Toronthal.

La malheureuse femme, probe et droite, connaissait cet odieux complot, qui avait envoyé trois patriotes à la mort. Un mot échappé à son mari, au moment où ses affaires périclitaient, un espoir imprudemment formulé qu’une portion de la fortune du comte Mathias Sandorf lui permettrait de se relever, des signatures qu’il avait dû demander à Mme Toronthal, avaient entraîné l’aveu de son intervention dans cette découverte de la conspiration de Trieste.

Une insurmontable répulsion pour l’homme à qui elle était liée, tel fut le sentiment qu’éprouva Mme Toronthal, — sentiment d’autant plus vif qu’elle était d’origine hongroise. Mais, on l’a dit, c’était une femme sans énergie morale. Abattue par ce coup, elle ne put s’en relever. Depuis cette époque, autant qu’il lui fut possible, à Trieste d’abord, à Raguse ensuite, elle vécut à l’écart, du moins dans la mesure que lui imposait sa situation. Sans doute, elle paraissait aux réceptions de l’hôtel du Stradone, il le fallait, et son mari l’y eût obligée ; mais,