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complications.

taient les salons de son père, ou qui la rencontraient quelquefois dans le Stradone.

On le croira sans peine, héritière d’une fortune que l’on disait énorme et qui devait un jour lui appartenir toute entière, Sava avait dû être recherchée. Mais, bien que plusieurs partis se fussent présentés, dans lesquels se trouvaient réunies toutes les convenances sociales, la jeune fille, consultée par sa mère, avait toujours refusé, sans donner aucun motif de son refus. Silas Toronthal, d’ailleurs, ne l’avait jamais pressentie ni pressée à ce sujet. Sans doute, le gendre qu’il lui fallait, — plus pour lui que pour Sava, — ne s’était pas encore offert.

Pour achever de peindre Sava Toronthal, il convient de noter une tendance très marquée qui la portait à admirer les actes de vertu ou de courage que peut engendrer le patriotisme. Non point qu’elle s’occupât de politique, mais le récit de tout ce qui touchait à la patrie, les sacrifices faits pour elle, les exemples récents dont s’honore l’histoire de son pays, la pénétraient profondément. Si ce n’était point dans le hasard de sa naissance qu’elle avait pu puiser de tels sentiments, — et à coup sûr, ils ne lui venaient pas de Silas Toronthal ! — c’est que, noble et généreuse, elle les avait naturellement trouvés dans son propre cœur.