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un billet de loterie.

de l’auberge – deux chambres fraîches et propres, d’ameublement modeste, il est vrai, mais dont la tenue indiquait les soins d’une bonne ménagère. Au-dessus, sous la couverture, débordant comme un toit de chalet, se trouvait la chambre de Joël, éclairée par une fenêtre, encadrée d’un découpage en sapin amenuisé avec goût. De là, le regard, après avoir parcouru un grandiose horizon de montagnes, pouvait descendre jusqu’au fond de l’étroite vallée, où mugissait le Maan, moitié torrent, moitié rivière. Un escalier de bois, à consoles trapues, à marches miroitantes, montait de la grande salle du rez-de-chaussée aux étages supérieurs. Rien de plus attrayant que l’aspect de cette maison, où le voyageur trouvait un confort bien rare dans les auberges de Norvège.

Hulda et sa mère habitaient donc le premier étage. C’est là que de bonne heure elles se retiraient toutes deux, quand elles étaient seules. Déjà dame Hansen, s’éclairant d’un chandelier de verre multicolore, avait gravi les premières marches de l’escalier, lorsqu’elle s’arrêta.

On frappait à la porte. Une voix se faisait entendre :

« Eh ! dame Hansen ! dame Hansen !

Dame Hansen redescendit.

« Qui peut venir si tard ? dit-elle.

– Est-ce qu’il serait arrivé quelque accident à Joël ? répondit vivement Hulda.

Aussitôt, elle revint vers la porte.

Il y avait là un jeune gars, un de ces gamins qui font le métier de skydskarl, lequel consiste à s’accrocher à l’arrière des kariols et à ramener le cheval au relais, quand l’étape est finie. Celui-ci était venu à pied et se tenait debout sur le seuil.

« Eh ! que veux-tu à cette heure ? dit Hulda.

– D’abord vous souhaiter le bonsoir, répondit le jeune gars.

– C’est tout ?

– Non ! ce n’est pas tout, mais ne faut-il pas toujours commencer par être poli ?

– Tu as raison ! Enfin, qui t’envoie ?