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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

Trois mois s’étaient écoulés, — trois longs mois de séparation, qui furent extrêmement pénibles pour Mrs Weldon. Cependant, son jeune enfant se rétablit, et elle était en mesure de pouvoir partir, lorsqu’on lui signala l’arrivée du Pilgrim.

Or, à cette époque, pour retourner à San-Francisco, Mrs Weldon se trouvait dans la nécessité d’aller chercher en Australie l’un des bâtiments de la Compagnie de transocéanique du « Golden Age », qui font le service de Melbourne à l’isthme de Panama par Papéiti. Puis, une fois rendue à Panama, il lui faudrait attendre le départ du steamer américain, qui établit une communication régulière entre l’isthme et la Californie. De là, des retards, des transbordements, toujours désagréables pour une femme et un enfant. Ce fut à ce moment que le Pilgrim vint en relâche à Auckland. Elle n’hésita pas et demanda au capitaine Hull de la prendre à son bord pour la reconduire à San-Francisco, elle, son fils, le cousin Bénédict et Nan, une vieille négresse qui la servait depuis son enfance. Trois milles lieues marines à faire sur un navire à voiles ! mais le bâtiment du capitaine Hull était si proprement tenu, et la saison si belle encore des deux côtés de l’Équateur ! Le capitaine Hull accepta, et mit aussitôt sa propre chambre à la disposition de sa passagère. Il voulait que, pendant une traversée qui pouvait durer de quarante à cinquante jours, Mrs Weldon fût installée aussi bien que possible à bord du baleinier.

Il y avait donc certains avantages pour Mrs Weldon à faire la traversée dans ces conditions. Le seul désavantage, c’était que cette traversée serait nécessairement allongée par suite de cette circonstance que le Pilgrim devait aller opérer son déchargement à Valparaiso, au Chili. Cela fait, il n’aurait plus qu’à remonter la côte américaine, avec des vents de terre qui rendent ces parages fort agréables.

Mrs Weldon était, d’ailleurs, une femme courageuse, que la mer n’effrayait pas. Âgée de trente ans alors, d’une santé robuste, ayant l’habitude des voyages de long-cours, pour avoir partagé avec son mari les fatigues de plusieurs traversées, elle ne redoutait pas les chances plus ou moins aléatoires d’un embarquement à bord d’un navire de médiocre tonnage. Elle connaissait le capitaine Hull pour un excellent marin, en qui James-W. Weldon avait toute confiance. Le Pilgrim était un bâtiment solide, bon marcheur, bien coté dans la flottille des baleiniers américains. L’occasion se présentait. Il fallait en profiter. Mrs Weldon en profita.

Le cousin Bénédict, — cela va sans dire, — devait l’accompagner.

Ce cousin était un brave homme, âgé de cinquante ans environ. Mais, malgré sa cinquantaine, il n’eût pas été prudent de le laisser sortir seul. Long plutôt que