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CHAPITRE VI PERCEPTION ET MESURE DL TEMI\S

si; 3o. La succession de nos sensations, les changements d'état de nolic sensibilité et sui'lout le passage d'une sensation à une autre nous donnent hi sensation et par suite la notion du temps. Si nous le concevons comme passé, présent et avenir, c'est sans doute en grande partie par la représen- tation des sensations passées et l'évocation des sensations à venir, maisavant tout par le mouvement de notre sensibilité — désir et jouissance — et par le mouvement de notre corps vers l'objet de notre désir. D'ailleurs, nous nous figurons le temps sous l'orme d'espace, parce que nous pouvons nous rej)résenter simultanément les divisions de l'espace, non celles du temps (i). Lo temps nous apparaît comme une ligne droite et ininterrompue, comme une succession linéaire de sensations correspondant à des images alignées <lans un espace réel ou imaginaire ; s'il y a sur la ligne des points vides de

  • ensation, ces points n'existent pas pour nous, et nous ne pouvons les réta-

blir que par la réflexion, en les rattachant à des phénomènes, c'est-à- <Iire à de nouvelles sources de sensations au moins possibles et imagi- naires (2).

Î^Si. Aussi mesurons-nous subjectivement la durée par le nombre, la variété, la complexité, l'intensité et la rapidité de nos sensations. Une durée

(r) On sait qu'il y a une relation étroite entre le sens de l'espace cl le sens auditif, auquel nous devons nos perceptions les plus fines et les plus précises des intervalles temporels. V. Prc- iniiTc Partie, § 35.

(■'.) Celte représentation du temps sous forme de ligne droite s'ex[)lique suilisammcnt par In raison que j'ai donnée plus haut. Ou ne saurait en conclure que nous percevions le temps par li's excitations du canal semi-circulaire antérieur ou sagittal (de Cyon). Si nous nous représentons le passé derrière nous et l'avenir devant nous, c'est que nous prenons tout naturellement la marclic connue terme de comparaison : quand nous marchons, les sources des sensations passées sont derrière! nous et les sources des sensations à venir devant nous. Quand nous considérons au contraire la marche du temps, le passé s'enfuit devant nous et l'avenir vient derrière nous ("on'.c- 0:/) — telles les eaux d'un lleuve, quand nous en suivons le cours du regard, les yeux tournés dans la direction de ce cours. Si nous devions la notion du temps aux canaux semi-circulaires, comment les sourds-muets l'auraient-ils ? On ne peut douter qu'ils la possèdent (v. Ilclen Kel- Icr, /. c).