Page:Verrier - Essai sur les principes de la métrique anglaise, 2e partie, 1909.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

76 r.sTHÉTiQUE ni; hvthme

pierre — mais dcsaccorcl entre les sons faibles (i). 2" Supposez, au con- traire, que les mesures à 2/8 et à 3/8 ne soient pas isochrones, mais seule- ment les temps : il y aura toujours coïncidence entre les deux sons, mais désaccord entre les sons forts, sauf entre ceux dont le numéro d'ordre est multiple commun de 2 et de 3(2). Ceux-ci, qui portent les temps marqués principaux, forment ainsi comme des accords consonants, sur lesquels se résolvent les accords dissonants. Dans l'harmonie de notre musique, natu- rellement, il y a aussi une harmonie rythmique. Généralement, elle ne procède que par accords, par consonances; mais les exemples de désaccord ne sont pas rares : c'est ainsi que parfois la mélodie a un rythme binaire, et l'accompagnement un rythme ternaire, ou inversement (3). Pour en revenir aux hics des paveurs, aux marteaux des carriers et aux instruments de musique à percussion, comme les différentes y;«/-//e5 ont d ordinaire une hauteur ou au moins un timbre différents, leur harmonie rvthmique est en même temps une polvphonie rvthmique.

Pour prendre des exemples plus simples de rythme composé, observez le forgeron et son aide quand ils battent un morceau de fer rouge. L'aide frappe avec le gros marteau à deux mains; le forgeron, qui tient d'une main les tenailles et les retourne, avec le petit marteau — parfois seulement sur l'enclume, pour battre la mesure (4). Les coups alternent en cadence, ainsi que les deux bruits, l'un fort et l'autre faible — l'un mat et l'autre clair. Ici déjà, la coordination des mouvements est nécessaire : autrement les marteaux se cogneraient, au grand dommage des outils et au grand dam des mains. Il en est de même pour les batteurs de blé : tour à tour, pour ne pas se heurter et surtout peut-être pour mieux s'exciter à l'ouvrage, ils frappent de leurs fléaux suivant un rvthmc ternaire, et l'aire sonore, dans une mesure à trois temps et à trois notes, sonne sous leurs coups répétés. Il en était déjà ainsi, avant l'invention du fléau,

quando il piè de' mietitori

in tre cori

con tre note urtô il terreno (5).

La coordination devient absolument indispensable pour les maçons qui se passent des pierres, pour les matelots qui tirent ensemble sur un câble,

C») 2/8

3/8

(^) 3/8

0/0 »■.»..».■»••»

(3) V. Beethoven, Sonates pour piano, i (Op. 2, n" i), prestissimo; 9 (Op. i4, n° i), rondo (cité au § 9, ex. z) ; 10 (Op. i!\, n" 2), allegro; 16 (Op. 3i, n" i), rondo ; 23 (Op. 07), alle- gro assai.

(4) Des forgerons m'ont dit rpi'ils frappaient ainsi l'enclume pour l'empêcher, par ce contre- coup, d'éclater sous le choc du gros marteau. Cette explication, certainement fausse, prouve combien la recherche du rythme est inconsciente.

(5) G. Carducci, Odi Barbare, Alla Fiima.