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Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/308

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besoin de l’obtenir, que je m’y pliais avec une répugnance chaque fois plus grande, répugnance qui ne faisait que s’accroître à mesure que la barbe me venait. La dernière démarche que je fis à ce sujet et qui m’attira, comme je l’ai marqué plus haut, une parole assez peu aimable, m’avait paru fort dure à avaler. Mes écrits, en outre, devenaient de jour en jour plus nombreux ; cette Virginie que j’avais développée avec l’énergie et la liberté que réclame un tel sujet ; ce livre de la Tyrannie que j’avais écrit, comme si j’étais né, comme si j’habitais dans un pays libre et où il fût permis de parler justice et liberté ; le plaisir que je trouvais à lire, à goûter, à sentir vivement Tacite et Machiavel, et un petit nombre d’autres écrivains sublimes et libres ; les réflexions qui m’avaient amené à me rendre un compte exact de ma véritable situation, et de l’impossibilité où j’étais, soit de rester à Turin en imprimant, soit d’imprimer en voulant y rester ; la conviction bien profonde qu’il y aurait pour moi mille dangers, mille déboires, à imprimer au dehors, en quelque lieu que je fusse, tant que je resterais soumis à une loi de ma patrie que je citerai plus bas ; joignez enfin à toutes ces raisons, qui sont par elles-mêmes assez graves et évidentes, la passion qui tout nouvellement et pour ma plus grande félicité venait de s’emparer de moi ; c’était assez, ce me semble, pour que je n’hésitasse plus à travailler avec une ardeur et une persévérance sans bornes à l’œuvre importante que j’avais conçue, celle de me dépiémontiser, autant que possible,